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Sociolingüística catalana


Les langues de la France, per Bernard Cerquiglini


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3. Territoire

"Les langues visées par la Charte sont essentiellement des langues territoriales" (Rapport explicatif, p. 11) :

b) par "territoire dans lequel une langue régionale ou minoritaire est pratiquée" on entend l'aire géographique dans laquelle cette langue est le mode d'expression d'un nombre de personnes ... (Charte, article 1, alinéa b)

Cette insistance sur la localisation géographique est fort explicite ; elle va de pair avec l'idée d'enracinement historique ; elle explique la difficulté avec laquelle la Charte manie la notion de "langue sans territoire" :

c) par "langues dépourvues de territoire", on entend les langues pratiquées par des ressortissants de l'État qui sont différentes de la (les) langue(s) pratiquée(s) par le reste de la population de l'État, mais qui, bien que traditionnellement pratiquées sur le territoire de l'État, ne peuvent pas être rattachées à une aire géographique particulière de celui-ci. (Charte, article 1, alinéa c)

C'est, semble-t-il, à ces langues que s'applique en priorité l'adjectif "minoritaires", et qu'est principalement réservée la possibilité de s'en tenir à la partie II de la Charte. Ce désir d'une assise géographique des langues régionales n'est pas sans contradiction avec l'intention culturelle que la Charte affiche. On peut faire valoir que la territorialisation systématique, issue du romantisme allemand qui inspira la linguistique du XIXe siècle, s'oppose en outre :

- aux principes républicains français, qui tiennent que la langue, élément culturel, appartient au patrimoine national ; le corse n'est pas propriété de la région de Corse, mais de la Nation.

- à la science, qui comprend mal l'expression "territoire d'une langue". Ceci ne peut désigner la zone dont la langue est issue : en remontant le cours de l'histoire, on constate que toutes les langues parlées en France ont une origine "étrangère", - y compris le français, qui fut d'abord un créole de latin parlé importé en Gaule. La seule justification scientifique est d'ordre statistique, et de peu d'intérêt : elle revient à distinguer la zone qui, à l'heure actuelle, connaît le plus de locuteurs d'un parler donné. En d'autres termes, le vrai territoire d'une langue est le cerveau de ceux qui la parlent.

- à la réalité sociolinguistique, qui rappelle que la mobilité sociale contemporaine est telle que l'on parle les différentes langues "régionales" un peu partout. Le créole est une réalité linguistique bien vivante de la région parisienne.

Signant puis ratifiant la Charte, la République française aurait donc intérêt, dans sa déclaration, à insister sur la vocation culturelle de la Charte, en minorant la tendance à la territorialisation. Elle pourrait également faire valoir qu'elle reconnaît cinq langues "dépourvues de territoire", effectivement parlées par ses ressortissants, et qui enrichissent son patrimoine : outre le berbère et l'arabe dialectal, le yiddish, le romani chib et l'arménien occidental (7). Elle pourrait rappeler enfin que seul le français, langue de la République, est la langue de tous et que toute autre langue parlée par un ressortissant français est, de fait, minoritaire.

4. Les dialectes de la langue officielle

Par définition, les variétés de la langue officielle ne sont pas du ressort d'un texte qui entend protéger les langues minoritaires, rendues précaires par l'extension, le rayonnement et l'officialisation de cette langue. Il convient donc de préciser la situation dialectale du français "national et standard".

 


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