3.1 La situation au Québec et dans la région métropolitaine de Montréal
Ces données révèlent que 82 % des personnes travaillent le plus souvent en français au Québec (Office québécois de la langue française, 2006 : indicateur 2.9). Par ailleurs, à l’aide dudeuxième volet de la question, il est aussi possible de savoir si les travailleurs visés utilisent une autre langue au travail. Afin de bien cerner cette réalité, nous avons élaboré la typologie suivante à partir des deux volets de la question de recensement sur la langue de travail.
Typologie d’utilisation du français et de l’anglais au travail
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Typologie |
Utilisation du français |
Utilisation de l’anglais |
Fréquence d’utilisation du français |
Fréquence d’utilisation de l’anglais |
Le plus souvent |
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Uniquement le français |
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Le plus souvent |
Régulièrement |
Surtout le français (langue principale) |
L’anglais comme langue complémentaire |
Le plus souvent |
Le plus souvent |
En français et en anglais à égalité |
Régulièrement |
Le plus souvent |
Le français comme langue complémentaire |
Surtout l’anglais (langue principale) |
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Le plus souvent |
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Uniquement en anglais |
Il en ressort, entre autres, que, si 59 % de ces travailleurs utilisent uniquement le français, les autres (41 %) utilisent l’anglais plus ou moins fréquemment, quand ce n’est pas de façon exclusive (Office québécois de la langue française, 2006 : indicateur 2.13).
Cela étant dit,nous nous concentrerons maintenant sur la région métropolitaine de Montréal qui comprend à la fois l’île de Montréal et les régions périphériques (couronne de Montréal). En effet, cette région regroupe la moitié des emplois au Québec en 2001 et elle est la plus diversifiée sur le plan linguistique : près de 30 % des travailleurs ne sont pas de langue maternelle française, alors qu’ailleurs au Québec, cette proportion ne dépasse pas 6 %.
De plus, cette région est intéressante à observer du fait de sa disparité linguistique (l’île de Montréal en comparaison avec la couronne de Montréal) et du navettage qui la caractérise : 40 % des personnes résidant dans les régions périphériques se rendent dans l’île afin d’y travailler.
Dans l’ensemble de la région métropolitaine de Montréal, 72 % des personnes travaillent le plus souvent en français : 42 % n’utilisent que cette langue et 30 % travaillent en français de manière prédominante, tout en recourant à l’anglais dans une moindre mesure. Cependant, les situations qui ont cours sur les territoires de l’île de Montréal et de la couronne s’avèrent fort différentes : 88 % de la main-d’œuvre travaillent principalement en français dans la couronne de Montréal et 65 % font de même dans l’île. (9)
Dans l’île de Montréal, nous pouvons dire que la quasi-totalité (99 %) des travailleurs de langue maternelle française utilisent leur langue maternelle au travail : 47 % n’utilisent que le français, 38 % utilisent principalement le français et 14 % utilisent le français, soit à égalité, soit à une moindre fréquence que l’anglais. Pour ce qui est de leurs collègues de langue maternelle anglaise, les deux tiers d’entre eux (67 %) emploient le français au travail : 4 % n’utilisent que le français, 13 % l’utilisent principalement, 9 %, à égalité avec l’anglais et 41 %, à une moins grande fréquence que l’anglais.
Parallèlement, l’anglais est aussi beaucoup utilisé par la main-d’œuvre travaillant dans l’île de Montréal : 54 % des travailleurs de langue maternelle française l’utilisent (38 % de façon complémentaire) et cette proportion est de 96 % chez les travailleurs de langue maternelle anglaise (33 % uniquement).
Graphique 1. Pourcentage de travailleurs selon la fréquence d'utilisation du français et la langue maternelle. Île de Montréal, 2001
Graphique 2. Pourcentage de travailleurs selon la fréquence d'utilisation de l'anglais et la langue maternelle
3.2 Les travailleurs de langue maternelle tierce et les immigrants
L’utilisation soutenue du français et celle tout de même appréciable de l’anglais sont tout aussi perceptibles chez les travailleurs n’ayant ni le français, ni l’anglais comme langue maternelle. En effet, la proportion de ces travailleurs qui utilisent le français (78 %) est similaire à celle utilisant l’anglais (77 %). Comme le montre le tableau suivant, cette égalité est perceptible à toutes les fréquences d’utilisation de la langue de travail.
Tableau 1. Distribution des travailleurs de langue maternelle tierce selon la fréquence d'utilisation du français et de l'anglais au travail
Fréquence d 'utilisation du français |
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Fréquence d 'utilisation de l'anglais |
Uniquement le français |
16,4 |
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Uniquement l'anglais |
15,6 |
Surtout le français |
23,7 |
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Surtout l'anglais |
23,4 |
À égalité (*) |
16,1 |
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À égalité (*) |
16,1 |
Régulièrement le français |
22,1 |
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Régulièrement l'anglais |
22,5 |
Aucunement le français |
21,7 |
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Aucunement l'anglais |
22,5 |
Total (Nbre) |
242.340 |
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Total (Nbre) |
242.340 |
(*) À égalité avec l'anglais, une autre langue ou les deux. |
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(*) À égalité avec le français, une autre langue ou les deux. |
La période à laquelle les immigrants sont arrivés au Québec jette un autre éclairage sur la situation et il est important d’en faire état. Chez les personnes arrivées avant 1961, c’est l’anglais qui domine comme langue de travail, car près de la moitié d’entre elles travaillent le plus souvent dans cette langue à Montréal. Chez les immigrants de la cohorte suivante (de 1961 à 1970), le français et l’anglais sont utilisés dans des proportions similaires (»38 %) tandis que chez les cohortes subséquentes, c’est-à-dire celles de 1971 à 1980 et celle de 1981 à 1990, le français est utilisé par la moitié de la main-d’œuvre tandis que l’anglais est la langue de travail dans environ 30 % des cas.
Chez les immigrants arrivés plus récemment, on constate qu’une plus faible proportion de travailleurs utilisent le français par rapport aux deux cohortes précédentes. Qui plus est, chez les travailleurs arrivés entre 1996 et 2001, l’anglais est un peu plus utilisé (43 %) que le français au travail (38 %). Le graphique suivant résume la situation.
Graphique 3. Pourcentage de travailleurs immigrants de langue maternelle tierce selon la langue de travail. Île de Montréal, 2001
3.3 La langue parlée à la maison et celle utilisée au travail
Le recensement canadien permet aussi de voir le lien entre la langue utilisée le plus souvent à la maison et celle utilisée au travail. Les données analysées montrent que les trois quarts des travailleurs de langue maternelle tierce qui parlent français à la maison travaillent le plus souvent en français, alors que chez ceux qui utilisent l’anglais au foyer, les deux tiers emploient cette langue au travail. C’est donc dire que les travailleurs de langue maternelle tierce qui ont fait une substitution linguistique (10) vers le français travaillent proportionnellement plus en français que ceux ayant effectué une substitution vers l’anglais ne travaillent en anglais.
Figure 2.
Lien entre la langue utilisée à la maison et la langue de travail chez les travailleurs de langue maternelle tierce ayant effectué une substitution linguistique. Île de Montréal, 2001
Si on prend la perspective inverse, c’est-à-dire le lien entre l’utilisation d’une langue au travail et l’adoption de cette même langue au foyer, nous constatons que chez les travailleurs de langue maternelle tierce qui ont effectué une substitution linguistique et qui travaillent le plus souvent en anglais, 88 % utilisent l’anglais à la maison. Cette correspondance entre la langue de travail et la langue employée au foyer est moins forte du côté du français : 66 % des personnes qui travaillent en français utilisent également le français à la maison. Donc, le lien entre la langue utilisée au travail et celle utilisée à la maison semble plus marqué lorsque les travailleurs de langue maternelle tierce utilisent l’anglais au travail que lorsqu’ils emploient le français.
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